sur Pierre Boulez
En 2016, le festival Musiques Démesurées me demande quelques mots sur Pierre Boulez. Les voici, reproduits non altérés.
J'ai rencontré Boulez en 1995 à l'occasion de la création d'une de mes premières œuvres au Théâtre des Champs Elysées. Il était alors le petit homme affable et prestigieux, pour moi compositeur de Dérive 1, et de Explosante-Fixe, qui se prêtait de bonne grâce et avec générosité aux rencontres et au soutien de jeunes compositeurs. Ce n'est que plus tard que j'ai compris qu'il était aussi l'artisan puissant d'outils façonnés sur ses besoins : l'Ircam et l'EIC. Son héritage (je passe sur sa carrière de chef, négligeable à l'exception de son engagement pour les compositeurs vivants) pouvait se mesurer dès les années 80 : une extrême exigence dans la réalisation d'œuvres soignées, héritières de l'élan des pionniers que sont Webern, Debussy. Mais aussi le gardien d'un classicisme de plus en plus rigide, où les règles du jeu (compositeur tout puissant, interprète exécutant, chef démiurge, partition iconique, européanocentrisme) ne sont pas à remettre en cause, à peine variées depuis 100 ans. Même si les contours de ses œuvres sont effectivement légèrement floutés (par effet de dissémination d'une pièce à l'autre, par les versions successives qui fonctionnent en palimpseste), même s'il a poussé le rapport de l'instrument à l'électronique en temps réel, le Boulez de la maturité apparait comme très en deçà des révolutions qu'il appelait de ses vœux dans les années 50. Ni l'opéra ni la danse, à peine la musique vocale, et finalement assez peu les questions touchant la forme du concert, la théatralité, le monde foisonnant de la diffusion du son (spatialisation, multidiffusion, etc.) ont été approfondis par Boulez, contrairement par exemple à Stockhausen, ou John Cage. Ce qui, avec le temps, tend à réduire son oeuvre à des bijoux, certes scintillants, d'un luxe versaillais, mais de petites dimensions, dont le rayonnement est intense, mais bref.
J'ai rencontré Boulez en 1995 à l'occasion de la création d'une de mes premières œuvres au Théâtre des Champs Elysées. Il était alors le petit homme affable et prestigieux, pour moi compositeur de Dérive 1, et de Explosante-Fixe, qui se prêtait de bonne grâce et avec générosité aux rencontres et au soutien de jeunes compositeurs. Ce n'est que plus tard que j'ai compris qu'il était aussi l'artisan puissant d'outils façonnés sur ses besoins : l'Ircam et l'EIC. Son héritage (je passe sur sa carrière de chef, négligeable à l'exception de son engagement pour les compositeurs vivants) pouvait se mesurer dès les années 80 : une extrême exigence dans la réalisation d'œuvres soignées, héritières de l'élan des pionniers que sont Webern, Debussy. Mais aussi le gardien d'un classicisme de plus en plus rigide, où les règles du jeu (compositeur tout puissant, interprète exécutant, chef démiurge, partition iconique, européanocentrisme) ne sont pas à remettre en cause, à peine variées depuis 100 ans. Même si les contours de ses œuvres sont effectivement légèrement floutés (par effet de dissémination d'une pièce à l'autre, par les versions successives qui fonctionnent en palimpseste), même s'il a poussé le rapport de l'instrument à l'électronique en temps réel, le Boulez de la maturité apparait comme très en deçà des révolutions qu'il appelait de ses vœux dans les années 50. Ni l'opéra ni la danse, à peine la musique vocale, et finalement assez peu les questions touchant la forme du concert, la théatralité, le monde foisonnant de la diffusion du son (spatialisation, multidiffusion, etc.) ont été approfondis par Boulez, contrairement par exemple à Stockhausen, ou John Cage. Ce qui, avec le temps, tend à réduire son oeuvre à des bijoux, certes scintillants, d'un luxe versaillais, mais de petites dimensions, dont le rayonnement est intense, mais bref.
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